Court ouvrage à petit prix qui permet de découvrir un essai du grand Henry David Thoreau. Oui, je suis assez fan de ses écrits sur la nature, tel son "Walden", mais lire son avis sur la marche est très intéressant car cette action, selon lui, nous rapproche de ce qu'il appel le "sauvage" et par là nous connecte à ce qu'il y a de plus vivant en nous.
"Marcher" de Henry David Thoreau
Ainsi s'ouvre cet essai d'Henry David Thoreau, l'auteur du célèbre "Walden" :
Je voudrais me faire l'avocat de la Nature, de la liberté absolue et de la vie sauvage qu'on y trouve, par contraste avec la liberté et la culture simplement policées. Je souhaite considérer l'homme comme un habitant ou une partie intégrante de la nature plutôt que comme membre de la société.
Dans ce court ouvrage au prix
très attractif de 3 euros, on retrouve un essai, ou plutôt une
conférence sur la marche donnée par Thoreau en 1851. L'ouvrage s'ouvre
sur une belle introduction de Michel Granger où il livre son analyse du
texte au regard de l'oeuvre de l'écrivain. Pour Thoreau, "marcher"
serait équivalent à "sauvage" car pour lui, le marcheur serait le plus
compétent pour parler de la nature sauvage.
Je crois que pour préserver ma santé et ma bonne humeur, il me faut passer au moins quatre heures par jour - et souvent beaucoup plus - à me promener à travers bois, par monts et par vaux, absolument libre de toute contingence matérielle.
Mais
pour Thoreau, marcher c'est aussi l'art de la flânerie dans un monde
porté par des valeurs protestantes pour qui le travail seraient le but de
la vie. Flâner, c'est résister. Marcher, c'est être libre. Pour Thoreau,
marcher en pleine nature est un art de vivre, une forme de culture de
soi, un acte essentiel pour toute l'humanité.
Ses
marches, outre le fait d'être une manière de se guérir d'un excès de
civilisation urbaine sont aussi une exploration méthodique des environs
de Concord. Il observe la nature, les marques, a rendez-vous avec tel
arbre ou telle fleur.
La vie s'accorde avec l'état sauvage, et ce qui est le plus vivant est le plus sauvage. Quand elle n'est pas encore asservie à l'homme, elle le rafraîchit de sa présence. Quiconque irait toujours de l'avant sans jamais prendre de repos et grandirait vite en exigeant infiniment de la vie, se retrouverait dans une contrée ou un pays sauvage nouveaux, entouré des matières premières de la vie. Il escaladerait les troncs abattus des arbres des forêts primitives.
Pour Thoreau, "est près du bien ce qui est sauvage".
Cette notion de "sauvage" est vaste. Bien loin de la notion de
sauvagerie liée à la cruauté, il lie le sauvage au primitif, à la vie
non apprivoisée ni affadie. Vision probablement romantique des choses,
un peu idéalisée, mais qui se veut à l'opposé d'une société rationnelle
et ordonnée. Au travers du sauvage, Thoreau souhaite y retrouver
l'énergie vitale des primitifs, celle que la civilisation aurait oubliée
ou refoulée, libre des dogmes et des contrôles.
Mais
pour Thoreau, l'Ouest est aussi le sauvage, ce nouvel Eden de son monde
en construction. Pour le coup, l'auteur se révèle être plus chauvin que
dissident. Néanmoins sa vision n'est pas celle de l'exploitation des
ressources mais plutôt l'occasion d'un ressourcement avec le sauvage.
Malheureusement, l'histoire montrera autre chose, laissant à la nature
justes quelques parcs naturels.
Moraliste, Thoreau peut
sembler être le philosophe rebelle des grands espaces, mais ce serait
oublier qu'il vécut toute sa vie à Concord, à la lisière sauvage,
explorant en marchant les alentours, poussant parfois plus loin, profitant tour à tour des bienfaits
de la nature et de ceux de la vie civilisée et intellectuelle. En cela,
il me plaît bien, car j'y retrouve un penchant personnel fort, celui du
besoin de nature et de culture, l'un n'étant pas opposé à l'autre, mais
l'un s’entremêlant à l'autre, se nourrissant l'un et l'autre. Et
marcher en pleine nature, pour moi, est devenu un besoin puissant, tout comme pour
Thoreau.
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"Marcher" - Henry David Thoreau
Reviewed by Julien le Naufragé
on
jeudi, janvier 04, 2018
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