"L'épée brisée" - Poul Anderson

 "Epée brisée" - Poul Anderson - Livre de Poche

Publié la même année que "La compagnie de l'anneau" de J.R.R. Tolkien, ce roman de Poul Anderson est resté non-traduit en France. Pourtant, "L'épée brisée" tire ses sources des mêmes sagas nordiques que pour Tolkien mais le récit de fantasy de Poul Anderson est résolument plus noir, plus dramatique et plus poétique que celui de Tolkien. Un livre qui a grandement influencé Michael Moorcock pour la création de son Cycle d'Elric. "L'épée brisée" est un roman à découvrir !


L'histoire de "L'épée brisée"


Voici l'histoire d'une épée qu'on dit capable de trancher jusqu'aux racines mêmes d'Yggdrasil, l'Arbre du Monde. Une épée dont on dit qu'elle fut brisée par Thor en personne. Maléfique. Forgée dans le Jotunheim par le géant Bölverk, et appelée à l'être à nouveau. Une épée qui, une fois dégainée, ne peut regagner son fourreau sans avoir tué. Voici l'histoire d'une vengeance porteuse de guerre par-delà le territoire des hommes. Un récit d'amours incestueuses. De haine. De mort. Une histoire de destinées inscrites dans les runes sanglantes martelées par les dieux, chuchotées par les Nornes. Une histoire de passions. Une histoire de vie...

(Quatrième de couverture du roman publié par Le Livre de Poche)


Mon avis sur "L'épée brisée" de Poul Anderson


Après un préface de Michael Moorcock et un avant-propos de Poul Anderson, on entre dans le récit de "L'épée brisée". Il me semble assez difficile de facilement et rapidement dresser l'histoire contenue dans ce roman tant l'histoire peut être tortueuse. C'est d'ailleurs un des grands intérêt du récit : on ne sait pas clairement où l'on va, les lignes directrices évoluent et le lecteur suit cela avec plaisir. 

D'un côté on a Skafloc, enfant naturel d'Orm le Fort. D'un autre, il y a Valgard, changelin né de la relation forcée entre l'elfe Irmic et une troll. Non-baptisé, Skafloc est volé par l'elfe Imric qui l'échange avec Valgard qui lui ressemble comme deux gouttes d'eau. Si l'humain Skafloc profite d'une belle vie et d'une belle éducation auprès des peuples de Faërie chez l'elfe Imric, Valgard pour sa part grandira auprès des hommes et restera habité par la noirceur du peuple troll. Mais derrière cet échange, se cache toute la fourberie de la vengeance d'une sorcière... et la manipulation des dieux.

"L'épée brisée" de Poul Anderson est avant tout une tragédie. Un récit complexe où l'auteur ne nous épargne rien : amour, héroïsme, trahisons, meurtres, manipulations, viol, inceste, etc. Un récit de fantasy qui mélange saga nordique et magie des peuples merveilleux. Si les hommes ne peuvent voir les mondes de Faëries, ces derniers peuvent influencer le monde des hommes. Tout comme les dieux ont aussi leurs rôles à jouer dans cette grande histoire. 

Saga nordique donc, mais d'une lecture plus aisée et modernisée que ne le sont les sagas d'il y a plusieurs siècles. La plume d'Anderson est plus fluide mais reste embellie d'une certaine poésie. J'oserais le terme de fantasy scaldique pour le coup, tant Anderson se plie au jeu des scaldes (poètes) de l'époque, allant jusqu'à glisser quelques vers ici et là dans le récit, comme dans les sagas nordiques. 

Publié en 1954, "L'épée brisée" fut publiée la même année qu'un autre célèbre roman de fantasy : "La compagnie de l'anneau" de J.R.R. Tolkien. Tous les deux inspirés des sagas scandinaves, "L'épée brisée" reste plus proche dans le style de celles-ci. Plus ramassé que le livre de Tolkien, le roman de Poul Anderson nous emmène avec concision et poésie à travers une tragédie incroyable où se mêlent amour et héroïsme. Mais surtout, le récit de Poul Anderson est résolument plus noir. La fantasy de "L'épée brisée" est d'une autre école, moins romantique que "Le Seigneur des anneaux" et nous prépare à d'autres chefs d'oeuvre du genre tel que le "Cycle d'Elric" de Michael Moorcock qui avoue dans sa préface tout ce qu'il doit à ce roman-ci.  

Pourtant, malgré cette publication en 1954 et la descendance d'une fantasy plus noir qu'il a donné, ce roman est resté inconnu et non-traduit chez nous jusqu'en 2014. La faute à la mauvaise image que l'on se faisait de cet auteur à une époque en France. Pourtant, "L'épée brisée" est vraiment un excellent livre. Superbement traduit par Jean-Daniel Brèque qui donne à ce roman toute la poésie qu'il doit avoir en anglais, ce livre reste une perle du genre. Un livre qui m'a happé et transporté pendant plusieurs heures de lecture. "L'épée brisée" est un roman qui aurait du être publié il y a longtemps déjà et dès lors on remerciera Le Bélial de continuer à nous faire découvrir les œuvres de Poul Anderson ainsi que Le Livre de Poche pour les mettre à auteurs de toutes les bourses.

"L'épée brisée" est vraiment un excellent roman de fantasy noire. Une fantasy que j'oserais dire scaldique tant l'on sent les racines de ce roman plonger dans les saga nordiques. Une fantasy noire qui plaira aux amateurs de Michael Moorcock chez qui je retournerais bien lire des aventures d'Elric. Un récit également différent dans le style de ce que l'on peut lire avec "La Patrouille du Temps", mais une oeuvre parfaitement maîtrisée et qui valait vraiment la peine d'être traduite pour enfin nous la rendre accessible.
"L'épée brisée" - Poul Anderson "L'épée brisée" - Poul Anderson Reviewed by Julien le Naufragé on jeudi, octobre 06, 2016 Rating: 5

6 commentaires:

  1. J'en garde un bon souvenir, dans le ton j'ai trouvé ça très proche des Enfants de Hurin. La couverture du poche est fort sympathique.

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    1. Je n'ai jamais lu "Les enfants de Hurin", je devrais peut-être. J'ai beaucoup aimé ce Poul Anderson. Et la couverture et bien mieux que celle de l'édition de chez Le Bélial (que je n'aimais pas du tout).

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  2. La comparaison avec "Le seigneur des anneaux" n'a lieu d'être que par le biais de leur date de publication, et leurs sources nordiques. Pour le reste, ils sont résolument différents et n'ont pas la même ambition (sans jugement de valeur aucun). Comme le dit Vert, c'est effectivement avec "Les enfants de Hurin" (que je te conseille vivement) qu'on peut plus facilement trouvé un lien de parenté.

    Et si tu as aimé "L'épée brisée", je te conseille également "La saga de Hrolf Kraki" du même Poul Anderson, une version romancée d'une "vraie" saga légendaire, excellente adaptation. ;)

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    1. Comparables uniquement par leurs dates de publication et leur sources, c'est aussi ce que je dis dans l'article 😉
      Je lirai probablement "La saga de Hrolf Kraki" un jour. Après le roman je m suis lu deux sagas dont celle de Erik le Rouge. Mais l'Edda est plus que recommandable aussi. Et je lirais bien le Kalevala aussi un jour.

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    2. J'ai lu l'Edda, intéressante lecture en effet. J'ai encore plein de sagas scandinaves et légendaires sur ma PAL... Avec le recul, la saga d'Erik le Rouge n'est pas la plus intéressante je trouve. Celle de Gisli Sursson l'est beaucoup plus je trouve (trouvable en folio 2€).
      Le Kalevala peut m'intéresser aussi, mais là on sort du monde viking, ce sera pour plus tard.

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    3. Celle d'Erik Le Rouge m'a semblé plus simple à lire que celle de Gisli Sursson. Le style âpre des sagas n'est pas toujours d'une lecture simple car totalement différente de la conception de notre récit actuel. J'y reviendrai peut-être un jour, mais pas tout de suite. Ou au travers de "La saga de Hrlf Kraki" ;-)

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