Après avoir lu "Requiem" de Graham Joyce il y a de très longues années, c'est avec plaisir que je me replonge dans son oeuvre avec "Les limites de l'enchantement" qui est un roman au merveilleux diffus réellement envoutant !!
L'histoire de "Les limites de l'enchantement"
Fern est une jeune fille qui vit en marge de la société avec sa mère d'adoption : Maman Cullen. Dans leur petit masure de la campagne anglaise, nos deux dames vivent en osmose avec la nature et ses esprits. Vivant de leurs connaissances d'herboriste, de sage-femme, de cuisinière ou encore de blanchisseuse.
Mais Fern va devoir faire face au monde moderne qui la rattrape dès lors que Maman Cullen tombe malade et se retrouve internée. D'un côté ce sont des hippies qui sont venus s'installer dans la vieille ferme voisine, avec leurs drôles de manières et leur musique hypnotisante. D'un autre côté, c'est leur propriétaire qui souhaite les expulser par manque de loyers payés. Et avec tout cela, Fern doit apprendre à vivre seule, sans Maman Cullen auprès d'elle. Elle doit subvenir à ses besoins, être présente auprès de Maman Cullen, et continuer à fournir ses services d'herboriste et de sage-femme pour le voisinage,... Mais elle doit aussi se préparer pour poser la Question et rejoindre ainsi le cercle des initiés...
Mon avis sur "Les limites de l'enchantement" de Graham Joyce
J'avais déjà pu lire du Graham Joyce il y a quelques années, tant en roman dans "Requiem" (Bragelonne, 2007) qu'en nouvelle au sein de l'anthologie "Fantasy 2006" (Bragelonne, 2006). J'avais bien aimé le fantastique parfois léger qu'il insufflait dans ses textes. Et je ne sais pas pourquoi je n'ai plus rien lu de lui depuis ?
Avec "Les limites de l'enchantement", je redécouvre Graham Joyce. Et avec d'autant plus de joie que ce roman est un vrai bon roman. Je ne sais pas si c'est son meilleur livre, mais toujours est-il que son récit tombe juste à point, qu'il convenait juste bien à mon humeur et envie de lecture du moment.
Graham Joyce nous emmène dans un récit teinté de merveilleux, mais de manière subtile et légère. Rien du fantastique habituel, on est dans le diffus, dans ce qui se trouve entre les lignes, dans ce qui lie les choses de la vie... Fern a grandi avec Maman Cullen et celle-ci lui a transmis son savoir, tant en herboristerie que des compétences de sage-femme. Et plus encore ! Car Maman Cullen lui a transmis bien plus, tout un savoir et une manière de vie qui la lie autrement au monde qui l'entoure. Fern et Maman Cullen sont comme des sorcières des temps modernes, des femmes qui vivent à la marge de la société, avec leurs manières de vivre, leur savoir et leur bonté dont elles se servent pour aider le voisinage qui vient leur demander leur soutien.
Mais Fern va devoir faire face au monde et à sa dure réalité. Maman Cullen, tombant malade, se retrouve internée et dès lors Fern est livrée à elle-même. Sauf que d'autres initiés viendront l'encadrer, comme Judith ou le vieux William. Néanmoins, Fern devra faire face à son propriétaire, représenté par ce sale type de Venables qui souhaite l'expulser par manque de loyers payés. Fern fera face, aidée par Judith mais aussi par Arthur, un homme au service de son propriétaire. Sans compter que Fern tient également en tête tous les noms de ces hommes qui ont poussé des femmes à avorter auprès de Maman Cullen...
Fern va aussi faire la rencontre de cette tribu de hippie venue s'installer dans la ferme voisine. Ferment de la contre-culture, inadaptés de la société et drogués notoires, ceux-ci seront mal acceptés par les gens du village. La police les a à l'oeil d'ailleurs car il ne faudrait pas que ces hurluberlus déversent leur drogue et leur décadence sur la jeunesse locale. Avec eux, Fern va découvrir la musique moderne, ce son étrange et hypnotisant. Et son amie Judith va y rencontrer le possible amour.
Fern va également commencer à découvrir ce que sont les hommes, autrement que comme étant ceux qui sont les inséminateurs de ces femmes qui accouchaient avec l'aide Maman Cullen. Les hommes sont encore des êtres étranges pour elle, mais la vie s'ouvrant à elle, le monde élargissant ses frontière, elle va commencer à le regarder autrement, d'abord avec peur, ensuite...
"Les limites de l'enchantement" est un très beau roman au merveilleux diffus. Un récit au rythme posé où la tension narrative tient dans la survie de Fern. Mais attention, rien du thriller ici, on est plus proche de la littérature contemporaine que du fantastique comme on se l'imagine souvent. Néanmoins, le roman de Graham Joyce déborde d'une beauté douce amer agréable. On y lit de très beaux passages où la nature porte en elle une présence quasi mystique, tant sa beauté et sa prégnance peut éblouir et envouter. Et le passage de la Question, par laquelle Fern deviendra elle-même une initiée, est juste incroyable et hallucinant. Le genre de passage que l'on avale d'un coup, presque sans respirer.
Bref, "Les limites de l'enchantement" est juste un superbe roman. Je m'en suis d'autant plus rendu compte une fois le livre terminé. D'abord, je l'ai dévoré super rapidement. Je n'arrivais pas à le lâcher. Et ensuite, une fois le livre terminé et que je n'arrivais pas à rentrer facilement dans un autre livre, je me suis rendu compte combien l'histoire m'avait captivé, voir vous trotte encore en tête. "Les limites de l'enchantement" est un très beau livre. Il ne plaira pas à tous, notamment parce que son fantastique est trop diffus, trop léger, que pour plaire aux fans pur et dur de l'imaginaire. Mais il offre également un récit autre, différent, tout autant qu'il est un récit sur la différence, la marginalité, et une ode à la beauté de la nature et au bien qu'elle procure.
A propos de Graham Joyce
Graham Joyce était un auteur anglais né en 1954 et malheureusement décédé en 2014. Écrivain de fantastique, il est aujourd'hui publié par Bragelonne éditions et Folio SF. Et précédemment par Pocket. Il a reçu de son vivant le Grand Prix de l'Imaginaire et le World Fantasy Award pour son roman "Lignes de vie".
"Les limites de l'enchantement" - Graham Joyce
Reviewed by Julien le Naufragé
on
dimanche, janvier 03, 2016
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J'allais écrire un long truc, mais non.
RépondreSupprimerGraham Joyce, c'est le bien.
J'allais quant à moi écrire un truc court, mais bon...
RépondreSupprimerTu m'apprends la triste nouvelle de son décès en 2014. J'avais furtivement rencontré Graham Joyce (je connaissais son traducteur) il y a une vingtaine d'année. C'était un homme très doux, qui portait un véritable intérêt pour ceux qu'il rencontrait, non pas comme un auteur avide de se documenter in vivo, mais comme un amoureux de la rencontre humaine.
Ses ouvrages portent toujours ce regard sur la complexité des âmes humaines. Et il est vrai que son fantastique diffus le rapproche d'avantage de la littérature générale que de la SF&F. Par bonheur, son talent a toujours su séduire un lectorat devenu fidèle.
Merci pour cette jolie critique, ami naufragé. Et que 2016 t'envoie les vents les plus favorables pour l'accomplissement de tous tes souhaits.
Fantastique léger, cela ne peut que me plaire ! Je le note, de toute façon j'avais bien aimé Lignes de vie donc celui-là aussi devrait me plaire ^^.
RépondreSupprimerj'ai bien aimé :)
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