C'est parce que l'on a tendance à ne lire que de la SFFF anglo-saxonne que j'avais envie de découvrir la SF espagnole. Tout comme j'aime découvrir la belge, la française, la suisse, l'allemande, etc. Pour des raisons économiques (chez les éditeurs), on reste centré sur la SFFF anglo-saxonne, mais il y a de très bons ateurs ailleurs également ! Dont certains sont à découvrir ici dedans.
A propos de l'anthologie "Dimension Espagne"
"Dimension Espagne" est une anthologie de SF espagnole présentée par Sylvie Miller. Outre la sélection des textes, celle-ci offre également une préface et une post-face intéressantes.
Au travers de cet ouvrage, on découvre d'excellents (et moins bons) textes des auteurs suivant : Juan Miguel Aguilera (La forêt de glace, Dernière visite avant le Christ, Voyage
au centre de l'univers), Elia Barceló (Les réapparus), Victor Conde (Le fil de l'épée de bois), Daniel Mares (Champs d'automne), Rafael Marín (Mein Führer), Rodolfo Martínez (Il traverse le désert, La route), Eduardo Vaquerizo (Les chemins du rêve, Une Terre pleine de questions).
De la SF qui nous emmène dans l'espace mais aussi à travers temps, parfois teintée de fantastique ou de poésie, parfois d'humour ou de réflexions intéressantes.
Mon avis sur l'anthologie
Dans l'ensemble, cette anthologie est très agréable à lire. D'autant plus qu'elle permet de découvrir une SF européenne autre qu'anglo-saxonne ou francophone. Et c'est vraiment quelque chose que je trouve très intéressant bien que surement peu vendeur.
Inégalement répartie au niveau volume des textes, on retrouve par exemple un tiers du livre dédié à Juan Miguel Aguilera. Il a les textes les plus longs, en a trois publiés, mais il est aussi le plus connu chez nous. Première incursion dans l'oeuvre littéraire de Juan Miguel Aguilera, ces trois récits, de bonne qualité, me donnent juste envie de découvrir le reste de l'oeuvre de l'auteur comme "Les enfants de l'éternité", "La folie de Dieu", "Le sommeil de la raison" ou encore "Le filet d'Indra". Excellente découverte et un personnage très sympathique à rencontrer en vrai également.
Juan Miguel Aguilera est également l'illustrateur de la couverture de l'anthologie.
Pour le reste, je retiendrai également Elia Barcelo dont "Les réapparus" est écrit avec un style assez envoûtant. Hélas, il n'existe en français que "Le secret de l'orfèvre" qui est une histoire d'amour qui a priori m'attire moins.
Dans les récits agréables, distrayants et amusants, j'y placerais Daniel Mares ("Champs d'automne") et Rafael Marin ("Mein Fürher"). Deux récits assez bons, mais celui de Rafael Marin est peut-être plus amusant de par son jeux de boucles temporelles entrelacées. Daniel Mares est finalement aussi inventif avec son histoire d'enquête dans un quartier de vieux centenaires.
Dans les inégaux, je placerais Rodolfo Martinez et Eduardo Vaquerizo. Pour chacun, il y a deux textes. Et pour chacun, j'en ai apprécié un et l'autre pas. C'est toujours le risque des nouvelles. Par exemple, Rodolfo Martinez offre un récit quasi poétique avec "Il traverse le désert" alors que "La route" me semblait bien moins efficace et accrocheur. De son côté, Eduardo Vaquerizo offre des questions sur l'autodétermination et le libre arbitre avec "La terre pleine de questions", alors que "Le chemin du rêve" m'a paru plus convenu tant on voit venir le dénouement.
Et puis finalement, il y a celui que je n'ai pas apprécié : Victor Conde. Avec un texte sur le trouble psychologique d'un soldat. Cela n'a pas fonctionné avec moi.
Terminons également par dire que les préface et la post-face de Sylvie Miller sont intéressantes. D'autant que la première ne dévoile trop rien du contenu des textes et la post-face complète agréablement le reste du livre. Un bon travail.
En détail pour chaque nouvelle
L'anthologie commence avec trois textes de Juan Miguel Aguilera qui depuis sa visite au Imaginales semble être de retour chez les éditeurs français. On ne s'en plaindra pas, que du contraire ! D'ailleurs, vous pouvez retrouver ses trois textes en numérique chez ActuSF.
"La forêt de glace" est un récit de space opera habilement construit et je suppose situé dans l'univers des "Enfants de l'éternité". Ici, pas de space opera militariste, mais une rencontre avec une autre forme de vie. Le récit démarre sur un songe sexuel, une rémanence d'un amour passé et disparu. L'amour, passé et actuel, est l'un des fils du récit, habilement placé au début et fin de l'histoire. Une question universelle bien sur. Ensuite, Juan Miguel Aguilera nous invite, au travers de ces personnages, à visiter un vaisseau inséminateur d'arbres, sensé servir à la colonisation, mais coincé dans l'espace et gelé à côté d'une comète. On y découvre un être autre, gelé, immobile et bien différent de ce que l'homme connaît. Cette rencontre de la différence amènera des questions sur la relation au temps, car notre vision du temps ne se voit que d'un point vue très relatif : celui de notre temps d'existence, de notre vitesse de vie. Une idée bien amenée. Le jeu sur la biologie de l'extra-terrestre est également intéressant pour moi. Peut-être parce que cela me parle plus que la physique. Une excellente nouvelle (je l'ai même lue deux fois) qui me donne envie de lire "Les enfants de l'éternité" (publié dans la Collection Hélios).
"Dernière visite avant le Christ" nous fait voyager dans le temps avec une série de touristes, jusqu'à ce qu'un acte terroriste ait lieu. Tuer un grand personnage historique peut-il changer l'histoire ? Rien n'est moins sur. D'autres peuvent reprendre le flambeau, l'histoire sera légèrement différente mais n'aura pas totalement été modifiée.
Suffirait-il, selon vous, de tuer le Fürher pour faire disparaître les idées d'extrême droite ? Suffirait-il de tuer un Ben Laden pour arrêter le développement de l'Islam extrémiste ? L'histoire nous prouve que non. Réflexions hors de la nouvelles mais le texte de Juan Miguel Aguilera amène à réfléchir plus loin. L'histoire ne se fait uniquement grâce à des personnages uniques et charismatiques.
"Voyage au centre de l'univers" nous raconte l’histoire de l'hypothétique rencontre entre Jules Verne et Pierre Teilhard de Chardin. Ce dernier va tenter d'expliquer sa notion de noosphère au grand écrivain, jusqu'à lui prouver l'existence du point Omega. Sympathique texte de Juan Miguel Aguilera.
"Les réapparus" d'Elia Barcelo est un texte bien ficelé et écrit avec style. L'auteure joue avec des ficelles fantastiques pour son récit mais le fonds est plutôt science-fiction. Le récit plaira aux amateurs de Mélanie Fazi. Une histoire de personnes survivant à la mort grâce à la science. Une personne en rencontre une autre, sans savoir que celle-ci est un "réapparus". J'ai bien aimé ce texte.
Victor Conde, avec "Le fil de l'épée de bois", nous raconte la vie d'un soldat revenu de la guerre contre les extra-terrestres mais qui n'arrive pas à revenir à la vie normal. Le combat et la mort le hante encore, jusqu'à la tragédie. Cela ne m'a pas touché du tout. Une impression de déjà vu même si le sujet reste encore à traiter. Je ne sais pas pourquoi, je ne suis pas rentré dedans et je n'ai pas terminé la lecture de ce texte ou juste en le survolant.
Avec "Champs d'automne", Daniel Mares raconte l'histoire d'une enquête sur une série de meurtres dans un quartier pour vieux. Dans ce coin de vie tranquille, on y retrouve un tas de vieux de plus de 100 ans et quelques uns de plus de 200 ans. Alors là bas, les enquêteurs sont aussi des vieux et ils sont aussi acariâtres. Sauf que pour le coup, notre vieil enquêteur local doit se faire aider par une jeune demoiselle pour trouver l'assassin.
Un texte fun, amusant et avec un style direct interpellant le lecteur. Un récit d'enquête distrayant sans être exceptionnel.
"Mein Fürher" de Rafael Marin propose des histoires combinées de paradoxes temporels où, en fonction de l'évolution de l’histoire, les protagonistes changent de rôle et leurs complots également. C'est assez amusant de voir l'Histoire changer tout comme les cibles de ces mêmes personnages. Un texte amusant à lire.
Victor Conde, avec "Le fil de l'épée de bois", nous raconte la vie d'un soldat revenu de la guerre contre les extra-terrestres mais qui n'arrive pas à revenir à la vie normal. Le combat et la mort le hante encore, jusqu'à la tragédie. Cela ne m'a pas touché du tout. Une impression de déjà vu même si le sujet reste encore à traiter. Je ne sais pas pourquoi, je ne suis pas rentré dedans et je n'ai pas terminé la lecture de ce texte ou juste en le survolant.
Avec "Champs d'automne", Daniel Mares raconte l'histoire d'une enquête sur une série de meurtres dans un quartier pour vieux. Dans ce coin de vie tranquille, on y retrouve un tas de vieux de plus de 100 ans et quelques uns de plus de 200 ans. Alors là bas, les enquêteurs sont aussi des vieux et ils sont aussi acariâtres. Sauf que pour le coup, notre vieil enquêteur local doit se faire aider par une jeune demoiselle pour trouver l'assassin.
Un texte fun, amusant et avec un style direct interpellant le lecteur. Un récit d'enquête distrayant sans être exceptionnel.
"Mein Fürher" de Rafael Marin propose des histoires combinées de paradoxes temporels où, en fonction de l'évolution de l’histoire, les protagonistes changent de rôle et leurs complots également. C'est assez amusant de voir l'Histoire changer tout comme les cibles de ces mêmes personnages. Un texte amusant à lire.
Avec "Il traverse le désert", Rodolfo Martinez offre un très court récit, celui d'un train automatisé qui continue seul sa course dans un monde où il ne reste plus qu'un seul homme. Course futile et dépourvue de sens sauf pour une machine programmée. Un texte bien écrit, avec un certain sens de la poésie qui m'a fait penser à Jean-Pierre Andrevon et Alain Dartevelle.
Rodolfo Martinez offre également un deuxième récit : "La route". Pour écourter sa peine, un criminel est envoyé comme explorateur sur une étrange planète. Il doit y suivre une route et trouver, s'il prend le bon chemin, une nouvelle Porte que devra prendre un autre type d'explorateur. Chemin faisant, il rencontre un autre gars et repense également à son passé.
La nouvelle a des passages très bien écrits mais dans l'ensemble, je n'ai pas hyper accroché.
Le premier des deux textes d'Eduardo Vaquerizo est "Le chemin du rêve". Des survivants de l'espèce humaine reviennent sur terre et la trouve dévastée. Plus rien ni personne. Sur leur chemin, ils croisent un astéroïde avec des statues à forme humaine. Que sont-elles ?
Un texte dont on voit venir la fin hélas de manière trop prévisible. Agréable à lire néanmoins mais sans plus pour moi. Ça manque de lyrisme dans le style, bien que les descriptions puissent faire rêver.
"La terre plein de questions", deuxième texte de Eduardo Vaquerizo, est une nouvelle qui rappelle Isaac Asimov à cause des robots (rapprochement facile, je suis d'accord). Seuls êtres présents sur Terre depuis le départ, ceux-ci errent sans but à travers le monde et croisent d'autres robots qui continuent à construire anarchiquement ou à détruire car ils ne savent rien faire d'autre, résultat de leur programmation. "Sans ordre, comment vivre ?" La question de l'autodétermination est du libre arbitre. Celle du robot, mais aussi finalement celle de l'homme qui se conduit comme une machine programmée. Ne vivons-nous que parce que les autres nous ordonnent de faire ceci ou cela ? Questions intéressantes. Un deuxième texte plus intéressant que le premier.
La nouvelle a des passages très bien écrits mais dans l'ensemble, je n'ai pas hyper accroché.
Le premier des deux textes d'Eduardo Vaquerizo est "Le chemin du rêve". Des survivants de l'espèce humaine reviennent sur terre et la trouve dévastée. Plus rien ni personne. Sur leur chemin, ils croisent un astéroïde avec des statues à forme humaine. Que sont-elles ?
Un texte dont on voit venir la fin hélas de manière trop prévisible. Agréable à lire néanmoins mais sans plus pour moi. Ça manque de lyrisme dans le style, bien que les descriptions puissent faire rêver.
"La terre plein de questions", deuxième texte de Eduardo Vaquerizo, est une nouvelle qui rappelle Isaac Asimov à cause des robots (rapprochement facile, je suis d'accord). Seuls êtres présents sur Terre depuis le départ, ceux-ci errent sans but à travers le monde et croisent d'autres robots qui continuent à construire anarchiquement ou à détruire car ils ne savent rien faire d'autre, résultat de leur programmation. "Sans ordre, comment vivre ?" La question de l'autodétermination est du libre arbitre. Celle du robot, mais aussi finalement celle de l'homme qui se conduit comme une machine programmée. Ne vivons-nous que parce que les autres nous ordonnent de faire ceci ou cela ? Questions intéressantes. Un deuxième texte plus intéressant que le premier.
A propos de Sylvie Miller
Sylvie Miller est auteure, traductrice et anthologiste. Elle a reçu le Prix européen 2003 du Grand Prix de l'Imaginaire pour l'ensemble de son travail en faveur de la SF espagnole en France.
"Dimension Espagne - Anthologie de SF espagnole" - présentée par Sylvie Miller
Reviewed by Julien le Naufragé
on
dimanche, janvier 10, 2016
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