Avec "La geste du sixième royaume", Adrien Thomas offre un premier roman de fantasy très réussi. Jouant avec certains clichés du genre, il s'amuse à les démonter et les réassembler. Plutôt écologiste dans son approche, le récit d'Adrien Tomas est loin d'être manichéen, jouant sur les équilibres dynamiques plutôt que sur une fantasy partagée trop simplement entre bien et mal. Un très chouette roman, une belle surprise qui mérite amplement son Prix Imaginales.
A propos d'Adrien Tomas
Adrien Tomas est un jeune auteur français né en 1986. Diplômé en écologie, il s'essaye à l'écriture et nous offre "La geste du sixième royaume" en 2011, livre qui reçoit le Prix Imaginales en 2012. En 2013, toujours chez Mnémos éditions, il publie "La maison des mages" qui se passe dans le même monde que son premier roman. En 2014, il publie "Notre-Dame des loups", un court roman entre western et horreur.
Mon avis sur "La geste du sixième royaume"
La fantasy, on en publie beaucoup de nos jours alors il est difficile de faire le tri entre ce qui est bon et moins bon, entre l'originalité et la resucée. Du coup, on regarde aux prix reçus par certains auteurs pour aider à faire son choix. Pour ma part, c'est lors d'un voyage aux Imaginales de 2012 que j'ai repéré ce roman. Néanmoins, ce n'est que l'année suivante que je l'achèterai pour finalement attendre début 2015 pour le lire, car un roman doit se lire au bon moment pour être dégusté !
Alors, c'est avec plaisir et envie que j'ai démarré ce roman que Xapur m'avait convaincu d'ouvrir. Préalablement publié chez Mnémos, ce roman existe aujourd'hui en poche dans l'excellente Collection Hélios, elle même issue originalement de Mnémos. On passe dès lors d'un gros pavé de 500 pages à un petit pavé de 700 pages. Bref, on en a pour quelques soirées de lecture.
L'histoire
Imaginez... Cinq royaumes, des nations ambitieuses souvent en guerre les unes avec les autres. Géographiquement située au milieu d'elles toutes : le sixième royaume, une grand forêt impénétrables où se cachent les êtres légendaires, ceux des rêves et des contes d'autrefois. Mais voilà que le royaume de Seï, aidé de la déesse Seva, décide de s'allier aux autres royaumes pour détruire le sixième royaume. Uni face à un ennemi, qui reste-t-il pour défendre ce dernier, ce havre où persiste les derniers êtres merveilleux des royaumes.
Alors se lèveront face aux cinq royaumes des héros enrôlés parfois malgré eux, car ce que les dieux demandent, le mortel ne peut le refuser. Ainsi deviendront des héros : un baladin en fuite ; une belle sorcière aux pouvoirs terribles et réveillée d'un très long sommeil ; un semi-nain commerçant de son état, seul bâtard de son espèce ; un jeune voleur, seul rescapé de sa bande urbaine décimée ; et un homme-loup qui réussira à échapper à un destin de phénomène de foire. Cinq être différents, cinq êtres que tout sépare et qui devront s'unir pour combattre les cinq royaumes.
"La geste du sicième royaume" est donc un roman épique de fantasy. Le topo de base n'a rien d'extraordinaire me direz-vous et je suis tout à fait d'accord avec vous. Des grands royaumes forts différents, des peuplades qui illustrent tant d'archétypes différents, des armées immenses qui vont s'opposer à un royaume unique, seul représentant des derniers êtres merveilleux peuplant ce monde. Bref, on croit furieusement être plonger quelque part en J.R.R. Tolkien et David Gemmel. Bon, ok, rien de nouveau sous le soleil, beaucoup de clichés et pif paf poum : les gentils vont gagner. Il y a un peu de cela, c'est vrais, du cliché fantasy comme on l'aime (ou pas), mais aussi un tas de choses qui viennent faire contre-pied aux stéréotypes du genre.
Alors se lèveront face aux cinq royaumes des héros enrôlés parfois malgré eux, car ce que les dieux demandent, le mortel ne peut le refuser. Ainsi deviendront des héros : un baladin en fuite ; une belle sorcière aux pouvoirs terribles et réveillée d'un très long sommeil ; un semi-nain commerçant de son état, seul bâtard de son espèce ; un jeune voleur, seul rescapé de sa bande urbaine décimée ; et un homme-loup qui réussira à échapper à un destin de phénomène de foire. Cinq être différents, cinq êtres que tout sépare et qui devront s'unir pour combattre les cinq royaumes.
A propos du livre
"La geste du sicième royaume" est donc un roman épique de fantasy. Le topo de base n'a rien d'extraordinaire me direz-vous et je suis tout à fait d'accord avec vous. Des grands royaumes forts différents, des peuplades qui illustrent tant d'archétypes différents, des armées immenses qui vont s'opposer à un royaume unique, seul représentant des derniers êtres merveilleux peuplant ce monde. Bref, on croit furieusement être plonger quelque part en J.R.R. Tolkien et David Gemmel. Bon, ok, rien de nouveau sous le soleil, beaucoup de clichés et pif paf poum : les gentils vont gagner. Il y a un peu de cela, c'est vrais, du cliché fantasy comme on l'aime (ou pas), mais aussi un tas de choses qui viennent faire contre-pied aux stéréotypes du genre.
La première chose qui marque, c'est que l'on n'est pas dans le sempiternel combat entre le bien et le mal. On y trouve une approche plus dynamique qui doit ressortir de la formation d'écologiste d'Adrien Tomas : un équilibre dynamique entre des éléments divers. Rien n'est bien ou mal. Il s'agit d'un équilibre en perpétuel mouvement. Dans "La geste du sixième royaume", Adrien Tomas oppose deux idées :
"- Je vais essayer de simplifier, proposa Lilthyn. Mettons que le Père personnalise les forces de la Nature sauvage, des rêves, des esprits, de la beauté pure et immuable de ce monde. L'Autre est l'esprit de la Nature maîtrisée, du progrès, du changement, de la réalité.
- C'est simplifié à l'extrême, remarqua Maev. Dit comme ça, on dirait que le Père est le doux seigneur des forêts et l'Autre le tyranique maître des forges et des flammes...
Llir hocha la tête.
- Ce n'est pas aussi simple, dit Maev. Prenez le concept de l'honneur, par exemple.
- L'honneur ? - Oui, vous savez... Ces préceptes chevaleresques, protéger les faibles, ne pas s'attaquer aux impuissants... Il s'agit d'idées radicalement opposées à la manière de voir les choses du Père. Dans la forêt, les forts survivent, et les faibles meurent pour garder le reste de la meute fort. S'attaquer aux faibles est le meilleur moyen de survivre, de remporter une victoire aisément et sans trop miser. L'honneur est une valeur de l'Autre, tandis que le Père pense que la fin justifie les moyens. Les obligations morales sont des reflets du progrès et de l'évolution des moeurs, tandis que seule la survie du plus fort compte lorsque l'on parle de nature sauvage..."
Comme vous le voyez, deux idées différentes, a priori opposées mais qui s'équilibrent continuellement pour éviter de tomber dans un excès ou l'autre qui serait délétère pour le monde. Au travers du récit d'Adrien Tomas, on verra que dans chaque camp, il y a des "bons" et des "méchants", que les idées qu'ils défendent chacun sont opposées, il reste néanmoins d'autres valeurs qui peuvent rassembler certains opposants. Tout est toujours mouvant dans ce récit et j'apprécie beaucoup cela.
Par ailleurs, Adrien Tomas aime casser d'autres clichés de la fantasy, sur les Elfes par exemple. Mais, je n'en dirai pas trop... sauf qu'il est loin de l'image de Tolkien sur le sujet.
La structure narrative est pas mal non plus. Comme chez G.R.R. Martin, Pierre Bordage ou autres, on alterne d'un personnage à l'autre. C'est une structure aujourd'hui connue mais qui reste efficace car elle met en avant la part subjective, souvent diamétralement opposée, de chaque intervenant sur une même scène. Cela permet de montrer que sur un même événement, selon son point de vue, l'analyse peut être fort différente. Ainsi en va-t-il également de l'idée que l'on se fait d'un événement passé, de l'histoire écrite qui dicte notre présent.
"Tu as raison de dire que la Vérité n'existe pas chez les humains : votre esprit est conçu de la sorte que l'histoire est forcément détournée au profit de celui que cela arrange le plus. Vos émotions gouvernent nombre de vos actes, et il vous est par exemple toujours plus simple de glorifier et d'encenser les actes d'un héros, ou de traîner le nom d'un ennemi dans la boue en l'accusant de fourberie, plutôt que de simplement reconnaître sa victoire. Votre histoire regorge de hauts faits de généraux courageux qui en réalité n'avaient presque rien fait, ou des rois éclairés qui en réalité étaient manipulés par leur femme."
Bref, "La geste du sixième royaume" est un bon roman de fantasy. Épais comme il se doit, fourmillant de personnages et d'aventures, le roman d'Adrien Tomas a pour gros avantage d'être une fantasy en un seul tome. Un fait rare à saluer. Certes "La Maison des mages" vient compléter ce roman, mais "La geste du sixième royaume" est un livre qui tient tout seul et qui tout en jouant avec les clichés en démontent d'autres. A saluer spécifiquement : cette absence de manichéisme. Le gros point fort de ce roman.
"La geste du sixième royaume" - Adrien Thomas
Reviewed by Julien le Naufragé
on
dimanche, mars 22, 2015
Rating:
Je l'ai offert... mais jamais lu :) J'avais demandé à ma libraire de la bonne fantasy en un seul tome. Le copain a été ravi de sa lecture.
RépondreSupprimerOuf, je suis bien content de voir que tu as aimé, c'est un bon roman qui joue avec les codes habituels de la fantasy.
RépondreSupprimer@ AcrO : J'ai mis du temps avant de m'y mettre. Sacré pavé, cela fait peur. Mais très chouette en fait.
RépondreSupprimer@ Xapur : Il tombait pile au moment où j'avais envie de fantasy et en plus il se joue des codes. J'adore. Surtout ce côté non-manichéen.
Décidément, il m'intéresse de plus en plus celui-là !
RépondreSupprimerJe rejoins Lorhkan. Xapur m'avait déjà convaincu, je le lirai certainement un jour. ^^
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