Cela faisait longtemps que je n'avais plus lu John Fante. Retour dans ses écrits avec un superbe roman.
+++ La quatrième de couverture +++
« On découvre dans Demande à la poussière une bourrasque littéraire qui
conte les aventures d'Arturo Bandini, Rital du Colorado. Dans la lignée
de Faulkner, et avant Charles Bukowski ou Jim Harrison, Fante ouvre une
piste balayée par les poussières chères à l'Ouest sauvage. Elle se
termine sur l'océan Pacifique, après moult détours, cuites et amours
sans lendemain. Arturo Bandini, c'est l'alter ego de John Fante, fils de
maçon bouillonnant, arpenteur de la dèche, écrivain avant tout. Arturo
Bandini, c'est aussi toute l'enfance de l'immigré italien, la misère,
l'humiliation de la mère trompée, les raclées du père. Les romans de
Fante sentent la chaleur écrasante ou le froid mordant, les routes
interminables, les chambres d'hôtel moites et les amoureuses sensuelles.
» - Sophie Cachon, Télérama
++ Mon avis ++
John Fante est un auteur du début du 20ème siècle. Fils d'immigré italien, il se lance dans la littérature et écrit avec un style résolument en avance sur son temps et très autobiographique. Jugé trop cru et trop provoquant, "Le route de Los Angeles" écrit en 1933 sera refusé. Ce n'est qu'en 1938 que son premier roman est publié : "Bandini". "Demande à la poussière" suivra et sera publié en 1939.
"J’ai vingt ans, j’ai l’âge de raison, j’ai le droit d’aller écumer les
rues en bas pour me chercher une femme. Mais tu n’as rien fait et ton
talent est douteux, ton talent est à faire pitié, et quel talent
d’abord? Alors tu déambules sur Bunker Hill en agitant le poing contre
le ciel et je sais ce que tu penses, Bandini. Exactement les mêmes
pensées que ton père a eues avant toi, comme autant de coups de lanière
sur ton échine, comme du feu dans ton crâne, que tu n’y es pour rien.
Et je traîne dans Downtown, la poussière des trottoirs recouvre mes savates d'un autre âge. Je décide de rentrer dans mon hôtel miteux pour écrire."
Et je traîne dans Downtown, la poussière des trottoirs recouvre mes savates d'un autre âge. Je décide de rentrer dans mon hôtel miteux pour écrire."
Semi-autobiographique, "Demande à la poussière" met en récit la vie d'un jeune fils d'immigré italien : Arturo Bandini. Alter ego de John Fante, l'auteur dépeint la vie d'un jeune auteur débarquant à Los Angeles quelque part dans les années 30. Une première nouvelle publiée dans un magazine, Bandini s'est loué une chambre dans un hôtel résidentiel. Assommé par la chaleur et fauché comme les blés, Arturo parcourt la ville à la recherche de l'inspiration pour un prochain texte. C'est dans un café qu'il fera la rencontre de Camilla Lopez, jeune mexicaine et serveuse au caractère ardent et bien trempé. Notre jeune rital est attiré par cette femme et malgré une approche un peu scabreuse et très macho, il se nouera quelque chose entre eux. Néanmoins, Bandini n'arrive pas à ses fins, ses envies le taraudent mais son éducation catholique le restreint dans ses élans, dans ses désirs.
Toujours en mal d'inspiration, Bandini continue à écrire à son éditeur, décrivant avec détails les malheurs de sa vie : ses élans, ses ratés, ses besoins, ses désirs, ses échecs, ses tourments et tout ce qui lui passe par la tête. De ses lettres, certaines sont publiées par l'éditeur, ce qui permet à Bandini de se remettre à flot, quelques dollars en mains qu'il flambe aussi vite qu'il les possède. Retour à la pauvreté. Personnage de l'excès, persuadé d'être un excellent auteur en devenir, Bandini s'en revient toujours vers sa "princesse maya" : Camilla Lopez. Un amour qu'il ne s'avoue pas vraiment pour un être qui ne l'aime pas, mais en aime un autre.
"Mais je suis pauvre et mon nom se termine par une voyelle, alors ils me
haïssent, moi et mon père et le père de mon père, et ils n'aimeraient
rien tant que de me faire la peau et m'humilier encore, mais à présent
ils sont vieux, en train de crever au soleil au milieu de la rue, en
pleine chaleur, en pleine poussière, tandis que moi je suis jeune, plein
d'espoir et d'amour pour mon pays et mon époque ; alors quand je te
traite de métèque ce n'est pas mon coeur qui parle mais cette vieille
blessure qui m'élance encore, et j'ai honte de cette chose terrible que
j'ai faite, tu peux pas savoir."
"Demande à la poussière" est le roman d'un homme fantasque et dépressif. Toujours dans l'excès, il passe de la pauvreté à la richesse pour revenir à la pauvreté, il passe du malheur au bonheur pour revenir au malheur. C'est aussi le roman de la solitude d'un personnage tourmenté, tant par la vie que par son être intérieur. "Demande à la poussière" est un roman de la pauvreté, de la débrouille, du rêve, de la misère, de l'amour à l'excès, de la divagation... John Fante offre par ailleurs une plume en avance sur son temps. Survitaminé, autobiographique et plein d'émotions brutes, l'auteur nous offre un texte hyper-prenant, très réaliste et résolument immersif. Un roman tellement envoutant que je l'ai dévoré en une journée ! Un roman cru et percutant à découvrir de toute urgence !
"Et maintenant, je faisais quoi ? Où étaient le désir et la passion ? Elle allait partir dans pas longtemps et alors ça viendrait. Mais nom de Dieu, Arturo, tu peux pas faire ça ! Rappelle-toi tes illustres ancêtres ! Montre-toi à la hauteur. Je sentais ses mains baladeuses et je les envoyais balader comme je pouvais tellement j'avais la trouille absolument, passionnément, ou alors je lui saisissais avec ferveur pour l'empêcher de s'en servir. De nouveau elle m'a embrassé. Autant donner ses lèvres à du jambon froid, pour tout l'effet que ça me faisait. J'étais en dessous de tout."
"Demande à la poussière" - John Fante
Reviewed by Julien le Naufragé
on
mardi, janvier 13, 2015
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