Derrière ce titre percutant se cache un petit roman (une novella?) bien construit de Didier Daeninckx. Un roman qui, une fois de plus, permet de sortir de l'ombre une partie de l'histoire coloniale française...
++ La quatrième de couverture ++
Paris 1931, l'Exposition Coloniale. Quelques jours avant l'inauguration officielle, empoisonnés ou victimes d'une nourriture inadaptée, tous les crocodiles du marigot meurent d'un coup.Une solution est négociée par les organisateurs afin de remédier à la catastrophe. Le cirque Höffner de Francfort-sur-le-Main, qui souhaite renouveler l'intérêt du public allemand, veut bien prêter les siens, mais en échange d'autant de Canaques. Qu'à cela ne tienne ! Les «cannibales» seront expédiés. Inspiré par ce fait authentique, le récit déroule l'intrigue sur fond du Paris des années trente - ses mentalités, l'univers étrange de l'Exposition - tout en mettant en perspective les révoltes qui devaient avoir lieu un demi-siècle plus tard en Nouvelle-Calédonie.
++ Mon avis ++
Après avoir lu "Galadio" du même auteur, j'avais envie de me plonger dans ce petit roman. Bien sur "La mort n'oublie personne" semble être son classique mais celui-ci semble également fort connu étant donné qu'on le retrouve facilement en librairie d'occasion.
Inspiré par un fait authentique de l'histoire coloniale française, Didier Daeninckx va mettre en lumière une partie restée sous ombre de l'histoire française. Ici il va prendre pour personnages principaux des Kanaks, ces indigènes de Nouvelle-Calédonie, en parlant d'eux lors de leur présence à Paris pour l'Exposition coloniale. A cette époque-là, pas si lointaine donc, on leur demandait de faire les sauvages, tels des animaux dans un zoo, ceci juste pour montrer leur stupidité naturelle et démontrer à la France le rôle salvateur de la colonisation dans ces contrées "sauvages". Traités comme des imbéciles, ils devront jouer leur rôle. Mais voilà, qu'un problème survient pour cette belle exposition : tous les crocodiles meurent. Alors pour les échanger, l'Exposition traite avec le Cirque Höffner pour obtenir des reptiles en prêt pour les dépanner. En échange, l'Exposition s'engage à prêter ses Kanaks pour relancer l'intérêt envers le cirque allemand. Bien sur, on ne demandera jamais l'avis de ces indigènes et le groupe sera ainsi scindé en deux. Cependant l'un d'entre eux ne sera pas d'accord avec cette séparation, d'autant qu'il s'est engagé sur l'honneur de veillé sur l'une d'entre eux et qui est partie pour le Cirque. S'en suivra donc une course pour ces Kanaks au travers de Paris, de ces hommes qui ne savent trop ce qu'ils font là dans cette citée, qui ne comprennent pas pourquoi on les séparent, qu'on les traitent ainsi malgré ce qu'ils ont endurés lors du voyages, etc.
La force du récit tient dans l'identification que l'on a avec ces Kanaks, de sentir ainsi leur dépaysement, leur tristesse et leur malheur dans ce pays si gris qu'est la France comparée à la Nouvelle-Calédonie et du traitement qu'on leur réserve. Cela permet, au travers de nos sentiments, d'imaginer ce qu'aurait pu sentir ces personnes. Bien sur, c'est une approche liée au ressenti et l'on pourrait critiquer cette approche peut-être pas tout à fait réel, mais c'est néanmoins la force de la fiction, nous faire voir et imaginer ce qu'à pu être le réel d'autres personnes. Et pour moi cela a bien marché.
Il faudra donc que je continue à découvrir l'oeuvre de Daeninckx, cet auteur engagé bien sympathique. Qu'il continue ainsi à lever le voile sur les parties de l'histoire française laissées dans l'ombre. Moi ça me plaît.
++ Mais encore ++
++ Le livre ++
- Poche: 120 pages
- Editeur : Gallimard (2 février 2000)
- Collection : Folio
- Photo : Serge Kakou / AKG Paris
"Cannibale" - Didier Daeninckx
Reviewed by Julien le Naufragé
on
mardi, janvier 15, 2013
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